Comment mieux prendre en considération la qualité de vie au travail des indépendants ?

Quelle QVT pour les indépendants et quels leviers pour améliorer leurs conditions de travail ? Tentative de réponse via la présentation de 2 projets passés par le Transformateur.

Quand on évoque la qualité de vie au travail (QVT), on pense spontanément aux conditions de travail, à l’environnement de travail, aux différents modes d’expression (celui des salariés, des partenaires sociaux, …), à la prévention des risques psychosociaux, …. Dans l’accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 relatif à la qualité de vie au travail, la QVT est décrite ainsi : « elle peut se concevoir comme un sentiment de bien-être au travail perçu collectivement et individuellement qui englobe l’ambiance, la culture de l’entreprise, l’intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, un droit à l’erreur accordé à chacun, une reconnaissance et une valorisation du travail effectué. Ainsi conçue, la qualité de vie au travail désigne et regroupe les dispositions récurrentes abordant notamment les modalités de mise en œuvre de l’organisation du travail permettant de concilier les modalités de l’amélioration des conditions de travail et de vie pour les salariés et la performance collective de l’entreprise. Elle est un des éléments constitutifs d’une responsabilité sociale d’entreprise assumée. »

Cette question de la QVT est donc plutôt associée au monde de l’entreprise et discutée pour améliorer les conditions de travail des collectifs de salariés. Mais qu’en est-il de la qualité de vie au travail des travailleurs indépendants et des nouveaux actifs (nouveaux, du fait des nouvelles formes de travail et des nouveaux statuts) ? Comment un indépendant peut améliorer ses propres conditions de travail, quand il travaille dans des collectifs dilués, changeant et/ou avec des statuts d’indépendant, d’auto-entrepreneur ou d’intérimaire ?

Une partie des travailleurs indépendants décident du contenu de leur travail et ont donc une activité dans laquelle ils choisissent les moyens de répondre à la mission, le rythme, les ressources, … ce qui leur permet une certaine autonomie. Le sens du travail, la responsabilité, l’absence de subordination sont également des valeurs auxquels ils sont attachés. Mais parallèlement à cela, ils sont aussi soumis à des risques professionnels importants, notamment dus à l’incertitude économique de leurs activités, à la solitude, à l’absence de collectif auquel se rattacher. La question de la QVT des indépendants ne doit pas être négligée, d’autant plus qu’elle prendra de l’importance au fur et à mesure que leur nombre augmentera.

Lors de la sélection du 3e appel à projet du Transformateur numérique, nous avons donc choisi deux projets dont la cible était les individuels et les indépendants : Ensemble1Job et Slashers. Ensemble1Job est une méthode « collabor’active » de définition de projet professionnel, reconversion et recherche d’emploi, se présentant sous la forme de groupes autonomes de 4 personnes pendant 20 semaines. Slashers se présente comme une plateforme de mise en relation des talents et souhaite répondre à la quête de sens des actifs en accompagnant leur transition vers de nouvelles formes de travail centrées sur la flexibilité, la coopération et l’autonomie.

Ces 2 projets sont assez emblématiques de la problématique « quelle QVT pour les indépendants et quels leviers pour améliorer leurs conditions de travail ? » car les indépendants revendiquent le besoin d’une certaine liberté dans le « contenu du travail » et son organisation (deux des branches de la QVT, qui comprennent l’autonomie, la motivation, le sens du travail, l’engagement, le levier de développement, la responsabilisation ou encore la gestion de ses propres rythmes), Les 2 projets souhaitent apporter du sens à l’activité des personnes, en comptant beaucoup sur l’engagement, l’envie et le développement personnel. Par contre ils sont assez absents dans la section « relation de travail », qui intègre le dialogue social, la participation, les capacités d’expression et d’actions, à l’exception des aspects « travail en équipe » et « partage » ; et abordent peu concrètement la question de la santé au travail (prévention des risques professionnels, qualité de l’environnement de travail, équilibre vie professionnelle/vie privée).

Au-delà de ces deux projets, une façon de mieux prendre en compte la question de QVT pour les indépendants serait que les entreprises, qui intègrent déjà cette notion dans leur politique salariale, l’étendent aux prestataires, notamment aux sous-traitants indépendants. Par ailleurs, les espaces de coworking, les nouveaux collectifs de travail, les plateformes collaboratives pourraient pallier l’absence de questionnement collectif en prenant en compte les problématiques individuelles.
Pour aller plus loin sur la question, je vous conseille la lecture de l’article de Jean-Yves Ottmann et Cindy Felio « Qualité de vie du travail indépendant »